english English version
GAPHE
Institut d'Astroph. et de Géoph.
Université de Liège
Quartier Agora
Allée du 6 août, 19c - Bât. B5c
B-4000 Liège (Sart-Tilman)
Belgique

Tel.: +32 (0)4.366.97.16
Fax: +32 (0)4.366.97.46

L'astrophysique des hautes énergies

Les hautes énergies comprennent tous les rayonnements dont l'énergie dépasse 100 eV, soit une énergie 50 fois supérieure au rayonnement visible. Elles sont séparées en rayons X (100 eV à 100 keV environ) et en rayons gamma (au-delà de 100 keV). L'émission peut être thermique ou non-thermique, mais est toujours associée à des événements particulièrements violents. Ainsi, un corps chaud peut émettre du rayonnement X thermique à condition que sa température dépasse... un million de degrés ! Du côté des processus non thermiques, on retrouve les effets Compton (direct ou inverse), ainsi que les rayonnements synchrotron ou bremsstrahlung associés à des particules chargées très énergétiques et des champs magnétiques ou électriques intenses. Des raies sont également produites, suite à l'éjection d'un électron depuis les couches internes des atomes (domaine X), suite à l'excitation d'un noyau ou à l'annihilation matière/antimatière (domaine gamma).

Le GAPHE est particulièrement intéressé par l'observation des émissions X et gamma en provenance des étoiles massives (seules ou en amas). En effet, ces données révèlent les phénomènes les plus extrêmes associés à ces astres, et fournissent donc des informations uniques sur ces objets.

Nos recherches en rayons X

XMM-Newton

Depuis 1999, deux observatoires X de nouvelle génération produisent des résultats exceptionnels : l'Européen XMM-Newton et l'Américain Chandra. Les chercheurs du GAPHE ont utilisé et utilisent aussi des données en provenance d'autres observatoires X (ROSAT, ASCA, Swift...) mais il y a une emphase particulière pour XMM. Cet observatoire se distingue par une sensibilité inégalée et l'utilisation en parallèle de 6 instruments (EPIC-pn, EPIC-MOS1 & 2, RGS 1 & 2, OM). Grâce à la participation liégeoise dans la conception du Moniteur Optique (OM) de XMM, notre équipe a bénéficié d'un accès privilégié au temps d'observation avec XMM. Outre ce temps garanti, nous avons également proposé avec succès des observations dans le cadre des différents appels à proposition lancés par l'ESA depuis 1999. Ces observations nous ont permis d'obtenir des résultats importants dans plusieurs domaines de l'astrophysique stellaire.

La nebuleuse de la Lagune en visible et X

L'observation d'amas ouverts dans le domaine X révèle deux types de populations : les étoiles massives adultes et les étoiles de faible masse encore en formation. En effet, nos données des amas NGC 6231, 6530, et 6383 (entre autres) montrent un nombre important de sources X dures, présentant souvent des éruptions de grande amplitude et donc associées à des étoiles pre-séquence principale de type T Tauri. Dans l'image ci-contre, les contours d'émission X (bleu) superposés à une image optique de l'amas NGC 6530 (jaune-rouge) indiquent que certaines des sources X les plus brillantes correspondent à des sources optiques plutôt faibles. D'autre part, nos données permettent également de caractériser les étoiles massives, peu nombreuses mais plus brillantes, précisant ainsi la nature de leur émission, la température du plasma chaud et le rapport entre luminosité X et la luminosité totale de l'étoile. Notre analyse d'un grand nombre d'objets semble d'ailleurs indiquer que cette relation luminosité X - luminosité bolométrique dépend de l'amas dans lequel on se trouve mais aussi de la manière d'analyser les données. Des étoiles massives particulières ont aussi été étudiées dans cette gamme d'énergie, comme les LBVs, les étoiles massives de type Oe, ou encore les étoiles massives magnétiques.

Spectre RGS de zeta Pup

Les spectres X à haute résolution révolutionnent l'astrophysique des hautes énergies, et tout particulièrement le domaine des étoiles massives. Les surprises furent en effet nombreuses : raies plus étroites et symétriques que prévu, absorption du vent stellaire moins grande qu'annoncé, formation du plasma chaud assez près de la surface stellaire (1 R* plutôt que 5). Notre équipe participe aux campagnes d'observation (par ex. 9 Sgr, HD159176, zeta Pup, et lambda Cep) mais aussi à l'effort de modélisation de ces raies X. Cela a permis de montrer que les raies X se forment d'une combinaison de plasmas chauds à différentes températures et situés dans différentes zones plus ou moins éloignées de l'étoile.

Lightcurve de WR21a

Puisque les rayons X permettent de "voir" les phénomènes violents de l'Univers, ils mettent donc particulièrement en évidence les collisions de vents stellaires dans les systèmes binaires massifs (voir aussi cette page pour plus d'informations à ce sujet). Ce type d'observation est une spécialité du GAPHE qui a eu la chance exceptionnelle de suivre les variations de l'émission X de plusieurs binaires au fil du temps (not. HD93403, HD152248, WR21a, et les étoiles de Cyg OB2). Les changements observés sont directement liés aux collisions et permettent de déduire des informations précieuses sur la forme de la zone de collision, les forces des vents, etc.

Spectre EPIC de 9Sgr

Certaines binaires massives possèdent une caractéristique unique : la présence d'émission radio non-thermique. Il s'agit d'une émission synchrotron associée à des électrons accélérés dans un choc violent, en fait la collision des vents stellaires. Outre la mise en évidence de la binarité de plusieurs émetteurs non-thermiques (not. 9 Sgr, Cyg OB2 #8A et #9) dans le domaine visible, le GAPHE conduit également un programme de recherche de la contrepartie "hautes énergies" de cette émission radio non-thermique. Dans le domaine des rayons X couvert par XMM ou Chandra, nous avons découvert que ces objets (ex. 9 Sgr, Cyg OB2 #8A) présentent une émission thermique typique des binaires à collision de vents et elle domine toute éventuelle composante non-thermique jusqu'à une énergie d'au moins 10keV.

Image X de WR22

Nos recherches ont également porté sur l'analyse de l'émission X des étoiles WR (voir aussi cette page pour plus d'informations à ce sujet). Les résultats ont été surprenants. Ainsi, malgré la sensibilité des instruments EPIC à bord de XMM, certaines WR (dont WR40) n'ont toujours pas été détectées dans le domaine X, ce qui s'explique probablement par l'opacité élevée de l'atmosphère de ces étoiles, alors que d'autres présentent des caractéristiques anormales (par ex. les variations à court terme d'origine inconnue de WR46). Nos données nous ont également permis de contraindre l'étendue des zones émettrices de rayons X dans certaines binaires à collision de vents comme WR22 et WR20a.

Image X de N11

Enfin, le GAPHE analyse aussi les émissions de nature diffuse, c'est-à-dire non associées à une étoile en particulier, notamment dans les régions N11 et de la Carène. Il s'agit souvent de la trace de l'interaction des vents stellaires avec le milieu ambiant, qui se solde par une collision titanesque chauffant le gaz à quelques millions de degrés.

Les choses ne s'arrêtent pas là : l'ESA a décidé qu'XMM aurait un successeur, Athena. Le GAPHE participe évidemment à cette nouvelle aventure! Outre la participation à la conception du spectrographe à champ intégral XIFU, avec nos collègues du CSL, le GAPHE est également impliqués dans la préparation scientifique de cette mission ambitieuse, via notamment la réalisation de simulations d'observations futures.

Nos recherches en rayons gamma

Depuis 2001, le satellite INTEGRAL offre une résolution angulaire sans précédent dans le domaine des rayons gamma de basse énergie grâce aux masques codés des instruments IBIS (imageur) et SPI (spectrographe). Ces instruments sont complétés par des moniteurs dans le domaine des rayons X durs (JEM-X) et dans le domaine optique (OMC).

Grâce à la participation liégeoise dans l'INTEGRAL Science Data Center (ISDC) et dans la construction de l'OMC, notre équipe a bénéficié d'un accès privilégié au temps garanti d'observation (le "core programme"). Notre objectif était l'identification des contreparties optiques de certaines sources gamma détectées avec d'autres satellites gamma dans les amas ouverts riches en étoiles massives.

Integral

Notre recherche systématique de sources gammma dans des associations OB et des amas ouverts très jeunes nous a mené à la découverte d'une source IBIS dans Carina OB1. Cette source se trouve près de la variable bleu lumineuse eta Carinae et pourrait donc prendre son origine dans l'interaction des vents stellaires de ce système binaire. Eta Carinae est donc le premier exemple de binaire massive présentant une émission non-thermique dans les rayons gamma produite par l'effet Compton inverse.

Outre l'accès aux données du temps garanti, nous avons également proposé avec succès des observations dans le cadre des appels à proposition lancés par l'Agence Spatiale Européenne. Ainsi, nous avons étudié l'amas Cyg OB2 afin de détecter l'émission gamma qui devrait accompagner l'émission radio non-thermique des étoiles O de cet amas. Ce groupe d'étoiles comporte au moins trois sources d'émission radio non-thermique (dont plusieurs binaires à collision de vents stellaires) et les particules relativistes qui produisent ce rayonnement synchrotron devraient aussi générer une émission gamma par diffusion Compton inverse des photons UV émis par les étoiles O. De plus, Cyg OB2 apparaît associé à une source de rayons gamma découverte par l'instrument EGRET du satellite Compton Gamma Ray Observatory (NASA, lancé en 1991). Cependant, nos observations INTEGRAL détaillées de Cyg OB2 n'ont pas permis de détecter d'émission haute énergie en provenance des étoiles Wolf-Rayet WR140, WR146 et WR147 ou de la source EGRET 3EG J2033+4118 ou encore de la source de rayons gamma de très haute énergie TeV J2032+4130. Ce résultat impose des contraintes importantes sur les mécanismes d'accélération de particules relativistes dans les étoiles massives de Cyg OB2 et les étoiles WR des alentours.

Université de Liège > Faculté des Sciences > Département d'Astrophysique, Géophysique et Océanographie > GAPHE